Approches radicales de la métropolisation - chantiers de recherche

Approches radicales de la métropolisation - chantiers de recherche

Thématique 3 : Marges des métropoles


Débat : Interstices, marges, lieux informels de la métropole

Dans les 4 premiers articles, on ressent le regard intéressé des anthropologues ou urbanistes, alors que dans le dernier, le contenu est plus « opérationnel ».
Question : Quelle place laisse-t-on vraiment à l’habitat spontané ?
Est-ce que l’habitat spontané peut avoir un intérêt pour la ville, notamment culturel ? (exemple des peintres dans certaines communautés)

 

Un paradoxe est mis en évidence : à partie de l’intention louable de la lutte contre l’insalubrité, certains logements sont qualifiés d’insalubres et laissés à l’abandon. Pourtant, ces logements pourraient bénéficier à certaines personnes, et seraient mieux que rien. Faut-il vraiment laisser ces logements vides ou en faire profiter des personnes pour qui cette insalubrité relative serait meilleure que leur situation actuelle ?

 

Remarques et éléments débattus :

-      L’insalubrité est relative au logement.

 

-      Les obligations de rénovations n’empêchent pas certains de louer. Certains propriétaires profitent du climat de pauvreté pour louer leurs logements à plusieurs personnes ou familles en même temps et touchent alors des loyers mirobolants. Idée d’exploitation de la misère.

 

-      Dualité avec la norme. Point de vue normatif. Cette norme se confronte à un problème d’éthique.  La normalisation des situations de l’exposé est impossible. L’intolérable est souvent rendu invisible par l’administratif. Soit on met les gens et les situations dans des cadres, soit ils disparaissent du champ et on essaie de les faire oublier.

 

-      Peut-on vraiment supprimer ce type d’habitat spontané ? L’habitat se complexifie au fur et à mesure de l’occupation d’un terrain. On peut déplacer les gens qui occupent ces terrains, mais pour les déplacer où ?

C’est une situation qui se répétera ailleurs plus tard. Le problème est alors de savoir ce qu’il se passe et ce que l’on fait entre temps. Question du logement temporaire. 
Lorsqu’il y a des « problèmes » avec une commune, l’objectif est de le déplacer, on peut comparer cela à un phénomène de NIMBY (Not In My BackYard). Le problème concerne surement le foncier occupé par des habitats spontané. Mais dans le cas de l’occupation d’un échangeur autoroutier, pourquoi vouloir déplacer les occupants ? L’espace ne serait pas occupé par autre chose et les personnes profitant de cet endroit ne sont pas visibles depuis le contexte environnant, surtout à grande vitesse (autoroute).

 

-      Il y a une obligation d’accueil pour les collectivités en termes de logements, par rapport au parc total de logements. Comme pour l’obligation du nombre de logements sociaux dans une ville certaines communes préfèrent payer une amende plutôt que de suivre l’obligation.

 

-      Le nombre d’habitats spontanés et de SDF est plus fort à Paris est dans la région parisienne. Pourquoi ces personnes souhaitent rester dans cette région plutôt qu’ailleurs, qu’on-t-ils de plus dans cette situation ? Y a-t-il plus de travail potentiel ?


C’est souvent une question de réseau et de ressources. Les gens qui viennent à Paris rejoignent souvent quelqu’un. Ils ont également un réseau autour d’eux et peuvent bénéficier de ressources plus facilement. L’entraide est facilitée. De plus, Paris a une certaine valeur, elle représente un rêve pour beaucoup de personne et cette dimension sensible fait de la ville une terre d’accueil pour beaucoup de personnes.

 


30/12/2013
0 Poster un commentaire

Résumé d'intervention : Anne-Claire Vallet, "S'approprier.... sous surveillance ?"

Anne-Claire Vallet est architecte, doctorante en anthropologie, co-directrice au LAA (laboratoire Architecture Anthropologie).

 

Sa recherche en cours s’intitule "S'approprier.... sous surveillance ?"
.

Cette recherche porte sur les espaces en friches résiduels de la ville, focale sur la notion d'habiter.


Méthode : rechercher des espaces, des terrains cachés où il n'y a que très peu d'associations (terrain difficilement visible) qui sont sur place.

Quatre terrains sélectionnés dans la banlieue populaire (1ère couronne) de Paris :
1. terrain en bordure de l'autoroute à Bagnolet
2. terrain vague suite à une démolition (Montreuil)
3. Interstice entre les autoroutes (Romainville)
4. terrain vague en attente, Montreuil

 

Histoire de chaque rencontre :

 

TERRAIN 1


Première rencontre avec un SDF en 2009. Retour sur place en 2012 : le même SDF habite toujours là mais un homme d'une trentaine d'années vit également sur ce morceau de territoire (depuis 3 jours). Rencontre simple avec cet homme. Climat d'angoisse dû aux délogements répétés de la police. Cet homme habite donc temporairement dans une tente pour faire illusion d'une installation courte (stratagème de non appropriation de l'espace, apparence d'une mobilité).
Le climat d'angoisse se dissipe, l'homme s'est donc construit une cabane de fortune (renonçant à l'électricité qui représente la limite à na pas franchir dans un contexte de surveillance).
La présence d'une cabane indique donc le contexte sécuritaire du moment.

 

TERRAIN 2


Rencontre en 2012 avec trois hommes (trois étrangers, sans papiers, deux trentenaires et un sexagénaire). Ils logent dans un reste de démolition (cabane en parpaings). Plusieurs possibilités d'accès à la cabane selon son niveau d'agilité. Une visite de voleur dans leur cabane pendant la journée. Un regret pour ces trois hommes : très peu de vie sociale puisqu'on n'invite pas ses amis aussi facilement que si l'on habite dans un appartement : sentiment de honte.
La discrétion de leur habitation ajoutée à leur discrétion a permis à ces trois hommes de vivre sans confrontation avec les voisins / la police. Les regards restent à distance (très grande parcelle).

 

TERRAIN 3


30 / 40 habitants coincés entre les bretelles d'autoroutes, environ 15 cabanes. Impression de village, de rapports de voisinage. Confort relatif puisque les cabanes sont reliées à l'électricité, ils peuvent donc se chauffer l'hiver. Les cabanes possèdent de grandes fenêtres, une structure poteau / poutre, les portes ferment à clé. Les habitations ne sont que très peu visibles depuis la route dans une partie

de ville où les piétons ne circulent pas. Terrain peu accessible et les habitants n'ont pas de visite. Un jour, la police constate l'occupation et prévient d'une future expulsion. Ordre de ne pas construire de nouvelles cabanes d'ici là.
L'expulsion devient effective et pour être sûr que personne ne pourra plus s'installer là, le terrain est martelé à coups de pelleteuse.

 

TERRAIN 4


Terrain vague depuis les années 90 (propriétaire privé, parcelle faisant partie d'une ZAC), la parcelle fait face à un centre des congrès. Installation de plusieurs familles de Roms depuis juin 2012. Peu de communication car personne ne parle suffisamment le français. Le terrain est encerclé de grillage mais les habitants ont ajouté des bâches pour recréer un sentiment d'intimité. Début avril 2013 : expulsion programmée (en raison d'un salon du livre pour enfant dans le centre des congrès). Mi- avril, les cabanes sont incendiées. La plupart des familles quitte les lieux et celles qui restent seront expulsées en mai sans aucune prévision. S'en suit alors une série d'expulsions répétées des familles sans alternatives proposées.

 

Eléments de conclusion

A travers tous ces exemples, on se rend compte que s'approprier l'espace n'est pas une question de volonté ou d'aptitudes mais est intimement lié avec la notion de surveillance et de propriété. Enjeux de gouvernance et de pouvoir politique.

 

 

Quelques notions de vocabulaire :

-      Friches : espaces indéterminés, non productifs dans cet entre-temps. Produit de la transformation urbaine, temporairement délaissés.

-      Appropriation : "faire sien, se créer un soi"

-      Roms : différence entre la représentation des Roms dans la société actuelle et le sens réel de ce mot. Selon les Nations unies et l’Union romani internationale, les Roms, «hommes» en hindi, désignent un ensemble de populations originaires du Rajasthan (Inde) ayant en commun une langue, le romani. En ce sens, les Gitans, les Sintis ou les Yéniches, arrivés en Europe occidentale depuis des générations, sont rom. Certains d’entre eux contestent cependant cette appartenance car, dans le langage courant, ce vocable renvoie aux seules populations migrantes d’Europe de l’Est. Le terme tsigane a également une portée générique. (http://ec.europa.eu/justice/discrimination/roma) 


 

 


 

Pour aller plus loin :


Je me suis réfugié là, Bord de routes en exil, M. Agier, S. Prestianni, 2011, 126p. 


 

Paris Refuge, habiter les interstices, F. Bouillon, S. Kassa, C. Girola, A.C. Vallet, sous la direction de Michel Agier, Editions du Croquant, coll. « Carnets d'exil », 2011, 191 p.

 

Interstices urbains, les délaissés de l'aménagement, S. Tonnelat, 2003 - Article en ligne http://stephane.tonnelat.free.fr/Welcome_files/ChimeresInterstices0001.PDF

 

L’intégration traditionnelle des Gabori de Transylvanie, Martin Olivera, Préparée sous la direction de Patrick Williams, Université Paris X – Nanterre, 2007, 573 p. http://www.romeurope.org/proto/IMG/these-martin-olivera-romanes.pdf

 


30/12/2013
0 Poster un commentaire

Document : «La lutte contre l’Habitat indigne, les politiques publiques et leur mise en œuvre en Ile-de-France», rapport IAU IdF, 2011

Le document étudié fait partie d'une étude publiée par l'IAU IdF sur l'Habitat dégradé et indigne en Île de France. (2011). p.69-80

 

L'extrait du rapport choisi présente un historique des politiques en faveur de l'amélioration de l'habitat et pour la lutte contre l'insalubrité.

 

Jusque dans les années 80, l’hygiénisme et le mouvement moderne prônent la démolition de l'habitat ancien insalubre en vue d'une reconstruction selon les principes modernes. Des parties de ville entières seront ainsi détruites, et leur population déplacées en périphérie.

En 1970, la loi Vivien définit le cadre juridique de ces interventions, son objectif étant avant tout la lutte contre les bidonvilles et les marchands de sommeil, qu'elle nomme pour la première fois. Elle permet notamment l'interdiction de louer des logements jugés insalubres, la possibilité d'ordonner la destruction d'immeubles ou d'ilots entiers ainsi que l'expropriation.

 

1980 marque le début d'une série de lois et de rapports en faveur de la rénovation des immeubles insalubres et pour la reconnaissance du droit à un logement digne, ainsi que pour la prise en compte du patrimoine urbain (1962 = création des secteurs sauvegardés).

Le processus de destruction-reconstruction systématique va ainsi être progressivement abandonné, notamment à cause d'un cout trop élevé, de la disparition des populations modestes des centre-villes, d'une situation moins urgente, d'une prise en compte du patrimoine...

 

Parmi les outils législatifs les plus notoires, le texte insiste notamment sur :

  • La loi NORA en 1975 qui insiste sur la rémédiabilité des situations de logements insalubres, privilégiant ainsi la rénovation à la destruction.
  • La loi SRU en 2000 (Solidarité et Renouvellement Urbain) qui revient sur le principe sanitaire de la loi Vivien pour lui donner une dimension urbanistique : lutter contre la ségrégation socio-spatiale.
  • Le plan PNLHI en 2001 (Plan National de Lutte contre l'Habitat Indigne), ayant pour but la coordination entre les différentes agences, ministères et services chargés de l'amélioration de l'habitat.
  • La loi DALO en 2007 (Droit au Logement Opposable), ciblant les habitants de logements précaires comme le public prioritaire des actions d'amélioration de l'Habitat.
  • La loi MOLLE en 2009 qui définit juridiquement le concept éthique d'insalubrité.

 

Dans un deuxième temps, le texte explicite les possibilités d'action actuelles et leurs modalités d'application pour lutter contre l'habitat précaire.

Elles se présentent sous quatre formes, faisant intervenir quatre types d'acteurs différents :

  • Les textes relatifs au logement du code civil ainsi que les ajouts postérieurs concernant les contrats locatifs. L'autorité est dans ce cas assurée par le juge d'instruction, qui, en vertu de la loi, est le seul à juger de la décence d'un logement.
  • Les aides financières incitatives pour l'amélioration de la qualité des logements, versées par l'ANAH (Agence Nationale pour l'Amélioration de l'Habitat), dont l'un des critères d'attribution est la décence des logements.
  • Les arrêtés d'insalubrité délivrés par un maire ou un préfet et contraignant un  propriétaire à des travaux de rénovation dans le cas d'immeubles insalubres ou menaçant ruine
  • Le « périmètre de restauration immobilière », définissant une zone où les travaux de rénovation sont obligatoires. Il est défini par les collectivités territoriales et inscrit dans le PLU.

Lien vers le rapport en pdf sur le site de l’IAU IdF


30/12/2013
0 Poster un commentaire

Résumé d'article : Les formes du non-logement en France, 2013

L'article a été publié sur le site bastamag.net. L'article dresse un bilan des différentes formes d'habitat précaire et spontané en France, en s'appuyant sur un rapport de l'observatoire des inégalités paru en 2013.

 

Il distingue ainsi différentes formes d'habitat précaire, dont le point commun et l'absence de logement personnel pour les personnes concernées (actuellement entre 100 000 et 150 000 personnes en France). L'auteur pointe cependant la difficulté de recenser ces personnes, lié notamment à l'inégalité d'une partie de ces formes d'habitat.

 

L'article commence en évoquant les différents dispositifs d'hébergement officiels disponibles en France (résidences sociales, foyers de migrants ou de jeunes travailleurs, centres pour demandeurs d’asile...), qui représente environ 310 000 places. Cela reste cependant trop peu et nombre de mal-logé doivent de fait avoir recours à d'autres solutions, non-officielles quant à elles 

 

La première de toutes est l'habitat précaire ponctuel. Nommée ici « habitat de fortune », elle se caractérise par son aspect spontané et autonome, n'étant pas inscrite dans un mouvement collectif ou organisé. L'auteur cite l'exemple de « caravanes immobilisées, baraques de chantier, logements en cours de construction, locaux agricoles aménagés, mobil-homes immobilisés dans des campings »

 

Le texte pointe également la réapparition de bidonvilles en France, forme d'habitat que l'on croyait disparue. Cette forme d'habitat concerne notamment des migrants et se caractérise par des conditions de vie extrêmement précaires (absence d'accès à l'eau, à l’électricité et à l'assainissement public).

L'auteur dénonce la réponse publique sécuritaire plutôt qu'humaine vis à vis de ces quartiers, marginalisant encore un peu plus ces population fragiles.

 

L'article en vient ensuite au problème des squats Contrairement aux bidonvilles, il s'agit d'un habitat dans des logements conventionnels mais sans cadre légal.

Il convient cependant de distinguer les squats culturels et politiques, ayant une bonne visibilité car non-subis et à portée revendicatrice, des squats de pauvreté. Ces derniers, majoritaires, sont cependant non quantifiables car cachés et subis par leurs occupants.

 

Le texte évoque également l'habitat mobile. Lorsque les communes en sont occupé, cette forme d'habitat s'installe sur des terrains aménagés et contrôles. Cependant, 40% des aires d'accueil obligatoires n'ayant pas encore été réalisées, les personnes concernent doivent bien souvent investir des interstices urbains laissés libres.

Cette forme d'occupation précaire se situe généralement en périphérie des villes (terre pleins d'autoroutes, déchetterie, zones ferroviaires...)

 

L'auteur évoque encore d'autres formes d'habitat précaire : l’hébergement subi chez des tiers, le logement prolongé en terrains de camping et l’hébergement temporaire en chambre d’hôtel. Notons que celles-ci ne génèrent cependant pas de nouvelles formes urbaines car elles n'impliquent pas d'appropriation des lieux.

 


Lien vers l’article sur le site bastamag.net

 


30/12/2013
0 Poster un commentaire

Résumé d'article : Quartiers d'origine spontanée - approche critique de la planification urbaine et régionale dans les villes d'Amérique latine et de la Méditerranée, Chryssanthi-Christy Petropoulou, 2007

Cet article est extrait de la revue Praxis, 1/2007

 

Au sein de l'article, Chryssanthi-Christy Petropoulou s'interroge sur l'existence éventuelle d'une culture alternative dans les quartiers d'habitat spontané et sur l'universalité de cette culture.

 

Au sein de ces quartiers d'habitat spontané se développe l'idée d'une « contre-hégémonie potentielle », réaction à la gestion urbaine classique. 

Cela passe notamment par l'essai de nouvelles fonctions et formes urbaines, détachées de la structure spatiale classique, qui est quant à elle programmée et contrôlée.

Or, la condition nécessaire pour que ce mode de vie alternatif devienne culture spontanée est la conscience par les populations concernées de leur existence au sein d'un mouvement urbain marginal.

 

Cela implique à la fois un fonctionnement communautaire et une autonomie vis à vis des organisations officielles telles que des partis politiques.

L'auteur distingue cependant deux types de culture liée à ces quartiers d'habitat spontané : La culture de la pauvreté, qui correspond à une précarité subie et ne peut constituer un terreau fertile pour ses habitants.

La culture de résistance, qui implique des valeurs de solidarité et de collectivité. Cette forme de culture, due à la volonté des habitants, semble quant à elle créatrice et poétique.

Il semble cependant que ces deux types de culture ne soient en fait qu'une seule et ne dépendent en fait que de l’intérêt et du point de vue de l'observateur.

 

Il déplore cependant le manque d'études comparative concernant la culture spontanée de ces quartiers. Il cite cependant plusieurs exemples dans divers endroits du globe : A Mexico, le quartier Nezahualcoyotl abrite nombre d'artistes qui contribuent à donner une image positive à cette favela. A Rio, on assiste à l’émergence d'une culture propre aux favelas, mais qui influence les artistes de l’extérieur en débordant de ses limites spatiales.L'auteur cité également l'exemple de la culture Hip-Hop, qui trouve ses créateurs et une partie de son public dans des quartiers d'habitat spontané, alors que la mouvement résulte d'une réinterprétation d'éléments de culture populaire ancienne.

 


Lien vers l’article en pdf sur le site internet de Chryssanthi-Christy Petropoulou

 


30/12/2013
0 Poster un commentaire


Ces blogs de Politique & Société pourraient vous intéresser